Lou Ottens, le père de la cassette audio, est mort
Le Néerlandais, ancien ingénieur chez Philips, est mort le 6 mars à 94 ans. Cent milliards de cassettes ont été vendues dans le monde depuis leur invention, en 1963.
Lui estimait « n’avoir rien fait de spécial ». Son invention avait pourtant changé la vie de générations de fans de musique. Le père de la cassette audio Lodewijk Frederik Ottens, dit Lou Ottens, est mort le 6 mars 2021, à 94 ans, à Duizel, dans le sud des Pays-Bas.
Ancien ingénieur chez Philips, le Néerlandais avait créé en 1963 la « musicassette », ouvrant la voie à l’écoute nomade de la musique. Le succès fut phénoménal : on estime que 100 milliards de cassettes ont été vendues dans le monde.
Né en 1926 à Bellingwolde, près de Groningue, Lou Ottens fut très tôt passionné par l’électronique et le son. Durant la guerre et l’occupation allemande, il fabrique une radio permettant à sa famille d’écouter la station clandestine Radio Oranje, malgré le brouillage organisé par les Allemands.
Après ses études d’ingénieur, Ottens entre chez Philips en 1952, dans la filiale belge, à Turnhout. En 1960, il devient responsable de la section développement du géant néerlandais de l’électronique. Un an plus tard, il sort le premier enregistreur portable de la marque, EL3585. Philips en vendra un million d’exemplaires.
Copié par Sony
C’est en mettant un bout de bois dans la poche de son manteau que Lou Ottens a l’idée de la « musicassette », confiait-il. Il se donne alors pour défi de produire un appareil de cette dimension. « La cassette est simplement née parce que les gens en avaient assez des grands enregistreurs à bandes », expliquait-il.
Présentée en 1963 lors d’une foire de l’électronique, son invention attire l’attention de visiteurs japonais qui avaient photographié la cassette. Quelques mois plus tard, Sony lance sa première cassette audio. Colère de Lou Ottens, pourtant réputé flegmatique : il s’envole sans tarder pour Tokyo et signe avec Sony un accord pour la standardisation de son invention. Ironie de l’histoire, c’est là-bas qu’il achètera sa première cassette, celle de Philips n’ayant été produite que douze mois plus tard. C’est aussi Sony qui sortira le premier Walkman (baladeur), au grand dépit du Néerlandais qui finira par se faire une raison.
Egalement impliqué dans le développement du CD
La firme japonaise sera d’ailleurs associée au développement du CD, l’autre « bébé » de Lou Ottens. En 1972, alors qu’il a pris la tête du « NatLab », le service recherche et développement de Philips, il commence à travailler avec son équipe sur ce nouveau mode de diffusion de la musique. Le CD sera commercialisé en 1980. Comme la cassette, le succès sera mondial, avec 200 milliards d’exemplaires vendus dans le monde à ce jour. Ottens avouera pourtant n’être pas satisfait par ce petit disque de 12 cm de diamètre : il aurait voulu en réduire encore la taille.
Modeste, il n’avait jamais revendiqué ses créations, et mettait surtout en avant ses collègues ingénieurs chez Philips. Sa fille Arine avait confié récemment avoir longtemps ignoré ce que son père avait inventé.
Interrogé il y a quelques années sur le regain d’intérêt pour le vinyle, M. Ottens ne s’en formalisait pas. « J’ai aussi créé des tourne-disques et je sais qu’ils engendrent des distorsions beaucoup plus importantes. Mais chacun entend ce qu’il veut entendre », ironisait-il. Parti à la retraite en 1986, l’ingénieur avait légué à ses collègues un livre contenant des centaines de nouveaux projets. « Nous avons toujours été des petits garçons qui s’amusaient », assurait Lou Ottens.